Images   &   Expérimentations

Jacques Desbiens                                      Contact

   Dessins

Hologrammes

Expérimentations

Labyrinthes

   Textes  

     Bio    

Une expérimentation dédaléenne de l’image

          Confronté aux procédés optiques et géométriques, en relation avec un environnement chaotique perçu dans le déplacement, mes recherches m’ont conduite dans un voyage qui utilise le dessin, l’optique, la photographie, l’infographie 3D et l’holographie pour  analyser et expérimenter la représentation de l’espace. À la croisée des chemins scientifiques et artistiques, du construit et du visuel erratique, de l’occident et de l’orient, volumes et dédales, traits et taches, mes expérimentations mettre à l’épreuve des idées tirées de l’histoire de l’art; j’observe, analyse et vérifie. Mes images sont des rapports d’expérimentations, des traces provenant d’un nomadisme hétérochronique.
          Depuis des siècles, l’espace tridimensionnel est représenté principalement au moyen de la perspective linéaire. Elle est dans nos images, dans notre vocabulaire, dans nos caméras, dans nos logiciels d’infographie. Vision cyclopéenne, partielle, conventionnelle, à partir d’un point de vue unique au centre du monde, la perspective traditionnelle est un carcan. Pourtant :

 

« Une montagne vue de face est ainsi, vue de côté elle est encore ainsi, et de dos ainsi encore. À chaque point de vue correspond un aspect différent. C’est ce qu’on entend par : « la forme de la montagne telle qu’on la voit en la regardant de tous côtés. » S’il en est ainsi, une seule montagne réunit en elle l’aspect de plusieurs dizaines ou centaines de montagnes. Se peut-il que nous ne parvenions pas à saisir à fond tout ceci? »


Guo Xi, 1117, Lin Ch’üan Kao Chih

(Le haut message des forêts et des sources)

          Ce qui est vu est perçu sous de multiples aspects. L’observation est une action en mouvement. Des variations constantes d’angles de vue découlent de ce mouvement. Vision chaotique, le regard se déploie dans l’espace et dans le temps, une succession de lieux et de moments, une accumulation. Ces voyages allongés dans l’image dérivent de
méthodes qui ne sont pas seulement des représentations « de » l’espace, mais aussi des représentations « dans » l’espace.


Le Labyrinthe oublié, 2016, graphite sur papier dans un carnet de format concertina, 765cm X 50cm.

          L’expérience des images issues des déplacements s’élabore dans des parcours où le crayon et l’optique recueillent des formes instables, imaginaires ou observables. En outre, l’analyse expérimentale de l’image artistique, de sa formation, sa présentation et sa perception, se distingue par sa capacité à utiliser l’inattendu et par son ouverture aux manipulations créatives. Dans l’amalgame des multiples images, la fragmentation, la distorsion et la transparence émergent. La confusion des formes résultant du déplacement et des multiples perspectives sont des compressions temporelles. Elles montrent l’incohérence du temps dans un espace fixe.

 

          « Tempus non est sine motu. » (Le temps n'existe pas sans mouvement.)


Roger Bacon, 1267, Opus Majus.


Descendant un escalier (Québec), 2017,
photographie numérique.
23 vues sur un cuboctaèdre, 2016,
infographie 3D.
 
         L'optique est spatiale.  Libérées de la surface, les multi-perspectives apparaissent dans l’holographie de synthèse. Des centaines d’images correspondant à autant d’angles de vue pour représenter un espace tridimensionnel. Cette multiplicité permet de reconstituer la parallaxe du mouvement observationnel. Devant ces hologrammes, les déplacements de l’observateur initient tridimensionnalité et cinétisme, synchronisations spatiales et incohérences temporelles. Ce que l’on voit d’ici est différent de ce que l’on voit de là.

     
Tractatus Holographis, 2005, deux angles de vue sur l’hologramme de synthèse, 60cm X 40cm.

          Vieux livres et optique diffractive, dessins inspirés de la peinture orientale, catoptrique et anti-perspective, références obscures et citations distantes, ces dispositifs anachroniques sont des espaces qui combinent le passé dans le présent et le présent dans le passé. Cette pratique expérimentale reflète l’hétérochronie de la recherche en histoire de l’art. Par ces structures optiques et géométriques, par ces références historiques et par leurs effets visuels, je crée ces images pour visualiser les fragmentations, les intersections et les méandres d’espaces et de temps, réels et imaginaires.

« Les fées + les faits = l’effet »

Louis Scutenaire (1984)Mes Inscriptions 1945-1963.


          La ville et le paysage sont des dédales, des méandres chaotiques que l’image ordonnée ne peut représenter que dans la réduction et l’éphémère. M
es images sont soumises aux exigences et aux aléas d’expérimentations supportant une conception labyrinthique de l’espace affectée par la turbulence des mouvements du regard, de la marche et de la perception chaotique. Agencements de vides et de pleins, ombres et lumières, lignes et nuées, obstacles et contournements, d’une vision dédaléenne de l’espace, libéré d’une géométrie égocentrique - le regard erre.

Dédale, 2019, encre sur bois, 125cm X 123cm.

Jacques Desbiens
Juillet 2019















© Jacques Desbiens 2019